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Dim 3 Mai 2020 - 11:49
Billy, 1914J'adore mon job. Je veux dire... celui pour lequel je suis ici, dans ce monde. Je vois la mort tous les jours, plusieurs fois par jour parfois. Mais ce n'est pas triste. Je ne sais pas où ils vont, je ne sais pas ce qu'il se passe après, s'il y a un après. Pour tout ceci, je suis assez proche des humains dans mon ignorance, parce que je ne le sais pas. Cela dit ça m'est égal. Je ne crois pas pouvoir mourir. Enfin... pas comme ça, en tout cas. Le moment venu, je disparaîtrais, c'est tout. Enfin, je suppose. Quoi qu'il en soit, mon travail est formidable, et loin de me rendre dépressif ou autre maladie psychique dont les humains sont capables. Moi, ça m'apaise, tout ça. Ça me rendrait joyeux, presque. J'aime jouer de la possibilité d'anticiper les choses et d'inciter les famille à venir rendre visite à leurs proches avant qu'il ne soit trop tard, maintenant que je suis médecin. C'est une chance inestimable.

Parce que tout ça, ça n'est pas toujours possible. Et il y a eu des périodes, des métiers, bien plus difficiles que d'autres. En France, notamment. 1914. J'aurai voulu ne jamais y revenir. 1944. Moins de trente ans aura suffit aux humains pour oublier. Mais moi, ça me hante toujours.

Soldat. C'est pas un bon métier pour nous, ça, les Messagers de la Mort. En temps de paix, on peut avoir pas mal de boulot, ponctuellement. Mais en tant de guerre ? C'est pas tant la charge de travail, le problème. C'est de s'engager auprès de ceux qu'on va regarder mourir. C'est pas comme médecin, où on suit un patient sur une période plus ou moins grande et de manière strictement professionnelle. Non, c'est pas ça, un soldat. Un soldat, c'est un frère. Un compagnon se survie. Sur qui on peut compter. Sur qui on doit compter. Je n'avais jamais vraiment compris ce qu'était la famille avant cette guerre. J'en avais pourtant vu, des champs de bataille. Mais jamais comme celui là.

Verdun. Il s'appelait William. Un petit gars sympa. À peine vingt ans. Il était venu pour voyager. Il voulait voir le monde, et il est venu mourir loin de chez lui. Tu m'étonnes. D'Australie, qu'il venait. Il était vraiment cool, ce petit gars. Toujours volontaire et souriant. Il savait remonter le moral des troupes comme personne. Je my' étais attaché, à ce con. C'est ce que fait la vie de soldat. Nos compagnons d'infortune sont tout ce que nous avons. Même ceux qui ont une famille. Au milieu des tranchées, elles n'ont pas leur place. C'est... trop loin. Trop irréel.

Il faisait nuit. La fumée des combats du jour plombaient encore l'atmosphère, entourant le premier croissant de lune d'un halo permettant d'éclairer le no man's land. La nuit ici, c'est le silence. Il n'y a plus un oiseau, plus un grillon. Ils sont pas fous, ils ont déserté depuis longtemps. Un silence pesant et angoissant. Et si l'ennemi profitait de l'obscurité pour....? Non. Les combats ont duré toute la journée. Ils sont épuisés. Ici aussi. C'est pas pour autant qu'on dort. Quand on le peut, quand on y arrive, c'est d'épuisement, d'un sommeil sans rêve, et ça vaut mieux. Les cauchemars sont récurrents, mais on fait semblant de ne pas le savoir. Si l'enfer existe, il est ici.

J'avais eu du boulot encore aujourd'hui. Des gamins, pour la plupart. Je ne crois pas avoir été démasqué, même si certains ont commencé à me surnommer "l'ange gardien". Je me suis engagé en tant qu'infirmier, faut dire. Que j'accompagne la plupart d'entre eux dans leurs derniers instants n'éveillent pas trop les soupçons. Mais la façon dont je le fais a l'air de les toucher. Je sais pas si c'est bon pour moi. Je commence à en accumuler, des familles chez qui aller présenter mes homages avec les derniers mots ou la dernière lettre de leur proche, quand tout ça sera terminé. J'avais rarement eu à faire ça, avant. Le monde évolue.

Je fumais. Ça faisait quelque chose à faire. Ça aussi, c'était nouveau. J'avais jamais eu à faire ça, avant. Faut croire que j'évolue avec le monde. Et puis il est arrivé, toujours souriant. William. J'allais lui sourire aussi... quand j'ai su. Mon visage s'est fané. C'était sa dernière nuit. Il a lu le désespoir dans mes yeux, comme on le voit tous les jours ici. Il s'est inquiété pour moi, et il est venu me remonter le moral. Le pire dans tout ça, c'est qu'il avait réussi.

Quelques heures plus tard, un obus lui arrachait la jambe et des éclats se logeaient dans ses poumons. Je lui hurlais des mots sans son, les bombardements nous rendant sourds l'un comme l'autre. Je rampais jusqu'à lui, lui attrapant la main. Il respirait encore.

- Ça va aller, Billy, ça va aller ! Je suis là...

Habituellement, j'accompagne ce genre d'affirmation par un regard doux plein d'assurance, parce que je sais que je vais prendre soin d'eux. Mais là... c'était plein de désillusion et de regret. Je ne voyais pas une âme que j'allais aider, je voyais toutes celles, encore en vie, qui apprendront sa mort. Alors, pour la première fois, je change mon discours. Je lui dis de tenir le coup, que ça va aller, tout en commençant à le traîner pour tenter de le faire parvenir à la tranchée, lui administrer les soins nécessaires... jusqu'à qu'il me demande de lui-même d'arrêter. Des sillons de larmes fissurant la boue sur mes joues, je finis par accepter son destin, et le mien.

Au milieu du no man's land, indifférent aux tirs qui continuent de marteler le sol, je m'agenouille auprès de mon compagnon d'infortune, pour son dernier voyage. Il me sourit encore. Il me rassure encore.

- J'suis désolé... Billy... J'suis désolé...

Il sourit encore.

- Billy...?

Le monde s'arrête autour de nous. Le même décors, le même silence, mais tout est léger. Tout va bien, Billy. T'es mort. C'est ce que je devrais dire, mais je n'y arrive pas.

- Ashok...? T'es toujours là...?
- Oui, je suis là. T'inquiètes pas.
- On est morts...?
- Non. Enfin... toi, oui.
- Pas toi ?
- Non.
- Pourquoi tu pleures ?
- Je voulais pas. Pas toi...
- Je dois y aller, Ashok.
- Je sais.
- Où est-ce qu'on doit aller ?
- Je sais pas. Ça dépend des gens... à toi de me dire.

Il ne m'a pas répondu. Comme si je connaissais déjà la réponse. Alors j'enchaîne :

- Tu me parlais de chez toi, en Australie.
- Oui, je voulais te présenter ma famille ! Oh. Ils vont...
- Ça va aller.
- C'est loin d'ici, l'Australie.
- C'est pas grave. Tu veux rentrer chez toi ?
- C'est possible ?
- Bien-sûr.
- Je peux te montrer ma famille ?
- Lewis m'a montré sa petite fille, hier. Il est parti près d'elle.
- Je... oui... Je veux rentrer... Je veux rentrer chez moi.

En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, la boue et le sang disparaissait, et nous nous retrouvions, léger, à l'autre bout de la planète, devant une ferme au milieu du bush australien.

- Est-ce que... est-ce que c'est aujourd'hui ?

J'ai besoin d'inspirer un peu l'atmosphère pour répondre à cette question. Je ne sais pas pourquoi ni comment je le sais, mais je le sais.

- Y'a trois ans.

À ma réponse, j'ai senti le phénomène préalable au départ. Son âme s'est comme illuminée, il m'a remercié, et m'a comme lâché la main pour rejoindre l'intérieur de sa maison. C'était la fin de son voyage.


Un tremblement de terre me ramène au présent. Ou plutôt, un obus qui la fait trembler. Je ressens à nouveau la douleur, et mon ouïe bouchée. Billy qui gît à mes côtés, ses doigts glissant des miens. Des torrents de larmes sillonnent désormais le limon de mon visage.

Quelqu'un me soulève par le torse, hurlant comme dans un bocal, me tirant pour me ramener dans la tranchée. Les sens engourdis, les réflexes et les imitations font le reste. Le chemin de l'information aussi. Au moment où ses frères auront le plus besoin de son réconfort, Billy ne reviendra pas.
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