La Machine InfernaleDepuis des siècles que j'exerce plusieurs métiers, dont médecin à différentes époques, jamais, avant d'arriver à Oslo, je n'avais vu une telle structure hospitalière. Toute une aile, rien que pour nous, les non-humains. J'avais déjà vu des hôpitaux spécialisés, souvent cachés et marginalisés, mal équipés, et craignant des attaques d'autres créatures, voir des humains eux-mêmes. Le Helse Magi, c'est comme un refuge, pour tout ce beau monde. Qu'importe que les loups-garous se retrouvent soignés au même endroit que les vampires, ici, il y a comme une trêve. Même si, évidemment, les incidents peuvent arriver. Mais en règle générale, toute cette cohabitation se passe plutôt bien.
Ici, j'exerce la plupart du temps dans différents services humains. C'est que c'est fragile, c'est bêtes-là, ils ont plus souvent plus besoin de moi que les autres. Évidemment, je ne passe pas non plus mon temps à ça ! En fait, au final, avec les avancées de ces dernières décennies, on sauve bien plus qu'on emporte. Ça doit faire plusieurs années que je n'ai pas eu à faire à une femme que j'aurai à guider juste après son accouchement, par exemple. Bien-sûr, ça arrive encore, mais tellement peu souvent désormais, du moins dans ces contrées, que je n'ai plus eu à m'en occuper depuis longtemps. Et c'est tant mieux, parce qu'à certaines époques, il fallait même que je revienne quelques jours plus tard pour le petit. C'était pas plus simple de faire les deux en même temps, non ? En plus, j'aime pas les bébés. Enfin, si, j'aime les enfants, mais guider une âme qui n'a pas encore appris ni à parler, ni à comprendre un minimum la vie, c'est une galère sans nom.
Anyway. Aujourd'hui, pédiatrie. C'est plutôt reposant, ce service, quand on fait un double-métier comme moi. C'est assez hallucinant dans le genre. Quelle que soit la gravité de la maladie ou de l'accident, c'est toujours pareil : 80% de guérisons, même dans les pronostics où, pour un adulte, on serait dans moins de 10% de chances de survie. C'est donc relativement rare qu'on ait besoin de moi, c'est pourquoi je rejoignais le couloir l'air léger, me disant qu'aujourd'hui, je n'aurai rien à faire d'autre que médecin.
Ou pas. En attrapant le sous-main listant les petits malades, les raisons de leurs hospitalisation et les numéros de chambres, mes yeux se fixent sur l'un d'eux en particulier. La plupart du temps, en hôpital, c'est de cette manière que je prends connaissance de mes "clients". Il m'arrive de les croiser avant d'avoir cette liste entre les mains, mais comme c'est généralement la première chose que je fais en prenant mon service... c'est ainsi. Je soupire un peu, fronce les sourcils. Le gamin est là pour une appendicite, il a été opéré la veille. Bon. Soit. Je demande à l'infirmière en charge quel médecin s'occupe de lui, et m'en vais le rejoindre.
J'aime pas, les gamins. Enfin, si. C'est les âmes les plus amusantes à guider, souvent. Mais une fois que c'est fait, faut supporter les parents, et là... ça s'annonce mal. Le pire dans tout ça ? C'est qu'on va tout faire pour tenter d'arranger les choses, et que ça ne servira à rien. Je préfère laisser à mes collègues le soin de s'occuper de la famille. Moi, je m'occupe de mes collègues. Enfin, je le ferais plus tard. Là, j'ai un gamin à aller ausculter.
Grand sourire, petites blagues rassurantes, grimaces en tout genre pour pouvoir regarder dans ses yeux ou dans sa bouche, et retour au sérieux un peu quand-même pour palper son ventre sans qu'il se torde de rire dans tous les sens. Ce serait dommage que ce soit ça qui entraîne le reste. Prise de température à base de "haut les mains!" alors que le laser pointe sur son front, et la visite est terminée. Un petit 37,6°C. C'est pas encore de la fièvre à proprement parler, mais c'est peut-être le signe d'un début d'infection. À surveiller. Je lui souris avec un petit salut de la main, et sors de sa chambre afin d'aller voir mon collègue, le Dr Karev.
Toujours souriant poliment, je lui tends les informations que je viens de relever sur le petit patient :
- Hey, Alex ! Dis voir, c'est probablement pas grand chose, mais la température du petit a l'air de monter un peu.
Et voilà, je viens de lancer "la machine infernale". Ce que je déteste. On va tout faire... pour rien. Brasser de l'air. Je l'emmènerais ce soir, quoi qu'il arrive, même si on se démène. Pour l'instant, aucun signe n'indique quoi que ce soit, mais de mon côté, je m'arrangerais pour faire ce qu'il faut. Du moins de mon point de vue. Inciter la famille, sans trop en avoir l'air, de passer du temps avec lui. Tenter une exception pour faire venir les frères et sœurs, même si habituellement, on évite. D'ici une heure ou deux, les aides-soignants, infirmiers et autres médecins qui ont l'habitude de travailler avec moi devraient avoir compris ce que je suis en train de faire.:copyright: 2981 12289 0
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Jeu 14 Mai 2020 - 3:46
Chaque journée est différente dans le service de pédiatrie. Au fond, on est presque des urgentistes en tant que spécialiste pédiatrique parce qu'on doit être apte à gérer toutes les parties du corps, tous les problèmes possibles. On ne pousse pas toujours jusqu'au bout, parfois on doit admettre ses limites et se référer aux vrais spécialistes du domaine, même s'ils n'ont pas l'habitude des formats miniatures.
Ce n'est pas facile par contre, même quand on est en contrôle, de devoir gérer ces petits humains parce qu'ils n'ont pas toujours conscience de ce qu'il se passe et même si on pourrait croire que justement ça rend le tout plus simple, c'est le contraire. Parce qu'on doit dire la vérité, mais l'embellir en même temps. Pas trop, juste assez. Et on doit aussi gérer les parents et cette partie-là non plus n'est pas franchement de tout repos.
Dernièrement heureusement, je n'ai pas eu trop de gros cas difficiles à gérer. Une pneumonie, une appendicite, des otites ou infections des yeux avec des complications bénignes. Rien qui me stressait réellement, rien de compliqué, du niveau de l'interne en réalité.
J'en profite pour réviser mes dossiers de patients en externes qui vont devoir revenir dans les prochaines semaines. Pour certains, c'est simplement de vérifier les résultats de prise de sang à chaque semaine pour pouvoir ajuster leur traitement et pour d'autres, c'était plus compliqué, c'était de tenter de trouver un nouveau traitement justement.
Je relève finalement la tête en entendant une voix qui m'interpelle et je prends la feuille que mon collègue me tend. Je n'ai pas souvent eu l'occasion de travailler avec lui, mais il m'avait semblé sympathique et plutôt professionnel, du coup je n'avais pas trop d'à-priori. Je fronce tout de même un peu les sourcils à ce qu'il me dit avant de regarder le dossier.
« Salut ! Bon.. Ça va être à surveiller, il était déjà un eu fragilisé à son arrivée, mais je pensais que la dose d'antibiotique à l'induction serait suffisante pour combattre une possible infection ... Je vais lui en faire redonner avec un anti-pyrétique et je vais demander une analyse sanguine.»
Je soupire un peu, réfléchissant plutôt rapidement.
« Est-ce que tu as remarqué autre chose ? Il s'est plaint de quelque chose ? »
Je considérais chacun de mes patients comme des personnes à part entière, leur vie était extrêmement précieuse à mes yeux et je faisais toujours tout en mon possible pour pouvoir leur offrir le meilleur traitement possible.
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Ven 8 Mai 2020 - 16:17
Depuis des siècles que j'exerce plusieurs métiers, dont médecin à différentes époques, jamais, avant d'arriver à Oslo, je n'avais vu une telle structure hospitalière. Toute une aile, rien que pour nous, les non-humains. J'avais déjà vu des hôpitaux spécialisés, souvent cachés et marginalisés, mal équipés, et craignant des attaques d'autres créatures, voir des humains eux-mêmes. Le Helse Magi, c'est comme un refuge, pour tout ce beau monde. Qu'importe que les loups-garous se retrouvent soignés au même endroit que les vampires, ici, il y a comme une trêve. Même si, évidemment, les incidents peuvent arriver. Mais en règle générale, toute cette cohabitation se passe plutôt bien.
