Cette mort, j'en fais mon affaire... (Céleste-Magnus)

Il était tard. Bien trop tard pour continuer de travailler, pour simplement même rester éveillé... et pourtant ! Pourtant Magnus ne dormait pas, et c'était donc tout naturellement que les appels d'urgence d'intervention venaient à lui, puisqu'il était l'un des rares à être joignable constamment.
Cette nuit là, il avait pourtant quitté son bureau pour monter l'escalier de l'immeuble menant à son logement de fonction. Histoire de dire qu'il ne vivait pas uniquement pour le travail... Mais une fois dans son canapé, il n'avait pu s'empêcher de ressortir des dossiers et de se plonger dans leurs lectures, jusqu'à ce qu'une sonnerie interrompt ses réflexions.

C'était une affaire qui s'était ouverte le jour même, dans la matinée, et le dossier s'était baladé dans les services avant d'atterrir dans les mains -ou plutôt les oreilles, vu qu'il l'apprenait au téléphone- de Magnus en pleine nuit... La raison du transfert de ce cas ? La légiste ayant récupéré le corps au matin l'avait trouvé couvert de traces évidentes d'un meurtre par surnaturel, et les analyses étaient en cours pour savoir si la victime elle-même faisait partie de cette civilisation.. les non-humains.

Et bien sur, le premier enquêteur sur l'affaire avait été un humain, sans la moindre connaissance du surnaturel, et la légiste avait du avoir toutes les peines du monde pour écarter l'homme souhaitant approcher le corps pour faire son boulot de flic... Magnus imaginait bien la scène. Devoir planquer le cadavre, sortir une excuse bidon pour éviter les contacts, signaler le cas aux personnes agrées pouvant mettre en lien la morgue avec une brigade spécialisée dans le surnaturel, et ainsi retiré l'affaire au premier enquêteur... Sale journée qu'elle avait du avoir, sans parler de son travail de base à effectuer sur le corps qui devait être bien amoché, s'il comportait des marques d'attaques surnaturelles...

Au téléphone, Magnus n'eut pas plus d'informations. Rien sur l'identité de la victime, simplement l'adresse de la morgue et le nom de la légiste qui avait temporisé la situation, une certaine Céleste Cursse.
Alors, puisque Magnus était du genre à faire des heures supp', il attrapa son blouson et quitta son appart' en claquant la porte avant de dévaler les marches. La traversée d'Oslo dans la nuit ne lui prit que quelques minutes, et déjà il était face au bâtiment de pierres, un peu austère, qui abritait la morgue civile de la ville.

Devant l'entrée, Magnus se trouva face à une porte close... rien d'étonnant vu l'heure tardive. Avisant un digicode, il observa quelques instants le clavier chiffré, où certaines touches semblait plus effacées que d'autres... plus utilisées donc ? Un sourire sur ses lèvres, le regard moqueur face à une sécurité aussi facilement contournable, Magnus tapa sur les chiffres visuellement à demi-effacés de manière à composer... une date. La date de construction du bâtiment, et il avait vu juste puisque le "bip" annonciateur de porte déverrouillée se fit entendre dans un déclic satisfaisant.

Magnus était désormais dans le hall... désert. Personne derrière le comptoir de l'accueil. Parfait d'après l'homme, qui contourna donc le bureau pour prendre place dans le siège, sortant l'ordinateur de sa veille pour consulter les dernières informations intégrées.
Sans difficulté, il trouva les "entrées" récentes, et celle qui l'intéressait plus particulièrement, datée de la matinée et inscrite dans le listing des corps pris en charge par la fameuse Céleste Cursse... Magnus consulta le numéro du laboratoire où était entreposé le corps, puis un rapide coup d'œil sur le plan d'évacuation en cas d'incendie pour situer la salle dans l'espace. Une fois le parcours retenu pour s'y rendre, il se leva du fauteuil, traversa le hall jusqu'au distributeur de boisson, récupéra un café... puis un deuxième, si jamais la légiste était dans les parages, et pris la direction du laboratoire.

Et c'est ainsi, franchissant la dernière porte qui le séparait du corps de sa nouvelle affaire, un gobelet fumant dans chaque main, que Magnus arriva en pleine nuit devant "son" cadavre.
Le corps était disposé sur la table mortuaire, mais n'était pas directement visible puisqu'une housse le recouvrait.
"Son" cadavre était certes bien là -et en même temps vu son état il se serait difficilement sauvé- mais, est-ce que la légiste aussi était dans les environs ?

Par chance, Magnus n'eut pas à rester beaucoup plus longtemps en compagnie du cadavre uniquement, puisque la porte s'ouvrit rapidement sur la venue d'une femme. Qui ne manqua pas de rester stupéfaite de sa présence dans la salle bien entendu...
Lui adressant un grand sourire charmeur, Magnus lança d'une voix assurée et un brin moqueuse "D'habitude, c'est plutôt moi qui pose les questions !" avant de la détailler plus attentivement.

De toute évidence, il devait s'agir de Céleste Cursse, la légiste attachée à cette affaire de mort en lien avec une tierce personne surnaturelle. A première vue, elle ne semblait pas -du moins physiquement- aborder des caractéristiques surnaturelles, mais Magnus avait ce sixième sens suffisamment bien affuté maintenant pour deviner qu'elle n'était pas simplement humaine comme lui. Si elle connaissait le surnaturel, c'est qu'elle en faisait partie, il était prêt à le parier.

Au delà de ça, elle lui fit plutôt bonne impression. Déjà, elle était encore sur les lieux, donc... une acharnée du travail, comme lui. Assez passionnée par son travail pour faire une nuit blanche et démêler un peu de vérité dans cette affaire. Et puis, elle avait un visage sincère, honnête. Et de beaux yeux, grands écarquillés pour le moment de le voir débarquer dans son labo, mais de beaux yeux tout de même.
Magnus s'interrompit dans son observation qui avait duré à peine une demi-seconde.
S'il se fiait souvent à son instinct, et aux premiers ressentit qu'il avait face à une nouvelle personne, il n'était tout de même pas du genre à laisser un blanc gênant s'installer en détaillant silencieusement la personne qui lui faisait face.

Il reprit donc la parole pour répondre aux interrogations légitimes de la légiste, désignant d'un signe de tête la silhouette reposant sous sa housse mortuaire.
- Je suis là pour mon cadavre. C'est depuis quelques minutes officiellement mon affaire.
Un nouveau sourire enjoué de sa part, alors qu'il lui tendait un des deux gobelets encore fumant.
- Beornsson, Magnus Beornsson. Un café ?