Ca change (Catherine Williams)

Quel mois de merde putain. Il fait une chaleur, je n'en peux plus. Ça me fou encore plus en rogne. Remarque, le côté pratique c’est que je n’ai pas besoin de surjoué ma mauvaise humeur, je l’ai réellement. En tout cas je compte les jours, j’ai vraiment hâte que le mois finisse et j’ai espoir que la chaleur en finisse avec ce mois. On peut toujours l’avoir, non ? L’espoir ? Même si je devrais être le premier à savoir que ça ne sert à rien. Depuis dix ans j’espère une chose impossible. Depuis dix ans un démon me colle au cul et j’ai beau espérer qu’il me lâche, rien à faire. J’ai beau espérer que Liorah s’en sorte, rien à faire. L’espoir c’est un beau bordel. Enfin bref, là je sors actuellement d’une chambre avec mon chariot et je me stoppe au milieu d’un couloir pour réapprovisionner mon chariot et aussi une pharmacie sur roulettes qui traine dans le couloir et qui est toujours sous verrou et tout ça, juste à côté d’une réserve bien sur.

Je déteste ça, ranger les choses. Je suis un infirmier, pas un larbin. Je suis meilleur que certains de leurs internes, d’ailleurs ils n'ont qu’à prendre leur interne pour faire le sale boulot. Je soupire et range avec non envié un des nombreux médicaments. Je regarde mon chariot, puis encore la pharmacie sur roulettes et finis de vider mon chariot. De toute façon j’ai l’impression que personne ne fait correctement son boulot ! Ouai il fait chaud, mais ce n'est pas une raison pour mal faire son travail putain ! Moi aussi j’ai chaud et ça m’énervait fortement ! Alors que je referme avec une violence non contrôlée un tiroir une voix se fait entendre près de moi et je relève les yeux avant de remarquer, avec surprise, la fille, la flic, que je croise toujours au club. Je regarde sa bouteille et la saisie doucement.

-Merci…

Je jette un regard autour de nous et bois alors remarquant qu’il n’y a personne qui peut soupçonner que je suis « gentil ».

Je me fais surprendre par la flic que j’ai croisée, jusqu’ici, uniquement au club et juste quelques fois, cependant ces deux fois-là on suffit pour qu’on sympathise plus ou moins. Plus ou moins oui puisque chaque fois elle m’a planté pour un appelle d’urgence à son boulot, mais ayant moi-même souvent des urgences, je peux que comprendre. Et puis elle est sexy, ça aide à passer au-dessus, elle a une beauté qui attire et vu la race dont elle fait partie ce n’est pas étonnant qu’elle dégage clairement quelque chose. Elle me propose de l’eau et j’accepte après avoir vérifié que personne ne me voyait. Après m’être bien désaltéré je lui rends sa bouteille.

-Merci…

Je souffle presque ça, comme si j’avais peur qu’on m’entende puis je tourne les yeux vers la chambre en question et fronce les sourcils.

-Et merde ! Putain…

Je m’énerve légèrement parce que… Parce qu’on c’était pas mal battu pour ce mec et voilà que la chaleur l’emporte ! Mais la chambre est déjà vide, elle a dû être vidé lorsque je m’occupais de l’autre patient, je soupire et pose mes mains sur mes hanches.

-Chaleur de merde… Elle nous les tue tous alors qu’on tente de les sauver !

Après une brève vérification je peux dire que c’est bon, personne risque de me voir, le couloir est désert et en même temps la clim du coin est péter alors ils vont voguer ailleurs dans l’hôpital, là où elle ne l’est pas et où elle marche ! Catherine me demande si je ne crains pas qu’on porte plainte et je regarde la clim un instant avant de regarder la belle sirène.

-Honnêtement ce n'est pas mon problème, mais celui du directeur. Cependant, j’imagine que ce connard peut toujours les avoirs en disant que la clim est en panne depuis peu et que ça n’a rien à voir avec l’état du patient…

Je soupire et secoue la tête. J’ai clairement un problème avec l’autorité, oui. Mais en même temps depuis Samaël. D’ailleurs, justement.

-De toute façon le comptable du coin, c’est lui le connard, il dirait qu'y a pas assez d’argent pour réparé ça.

Lorsqu’elle me dit que ça rend folle certaine personne cette chaleur je veux bien la croire. Je pense que le pire c’est vraiment que l’on colle tellement on transpire ! Je soupire donc.

-Et toi, tu supportes ?

Après tout c’est une sirène, elle doit avoir encore plus de mal que n’importe qui.

Catherine m’écoute attentivement et elle semble avoir son flair de flic qui se réveille, sauf qu’elle ne peut rien faire. Elle finit par me dire que si quelqu’un témoigne et qu’en plus ils trouvent des preuves il y aurait peut-être moyen de faire en sorte de faire péter le duo du comptable et du directeur. Ce serait génial, c’est vrai sauf que…

-Le problème c’est qu’il n’y a pas autant de morts normalement, juste… Le « nombre normal ». Du coup ils remettraient ça sur la chaleur et ils gagneraient quasi à coup sur. Le problème aussi c’est que c’est si c’est les autres qui gagnent… L'hôpital risquerait de fermer et je crois pas que c’est dans l'intérêt des autres patients… Ni des employés.

Lorsque je me concentre plutôt sur elle, elle semble soudainement mal et je la regarde un moment.

-Et tu finis quand ton service ? C’est pour ça que tu papillonnes sur la terre au lieu d’être peinarde dans ton eau ?

Me tournant totalement vers elle, je la regarde sans poser vraiment de question sur son passé, ça ne me regarde pas et je ne suis pas curieux de nature, je l’écoute si elle veut en parler, sinon... J’attendrais.

On dirait bien que ce qui se trame ici révolte la jolie sirène et malgré tout ce qu’elle veut faire ou peut faire vu son statut de flic, elle ne pourra malheureusement rien faire. En fait ça ne ferait qu'empirer les choses plus qu’autre chose et ce n'est franchement pas la bonne chose à faire. Rien que moi, pour ma sœur ça me ferait chier, elle tente de me dire qu’ils mettraient simplement l’hôpital aux normes et je secoue la tête en la fixant.

-Tu le sais parfaitement que s’ils le font pas, ça fermera et je pense que s’ils auraient envie de le faire, ils l’auraient déjà fait…

Faudrait parler au comptable, mais ne compter par sur moi pour aller voir ce fils de pute. Qu’il retourne en enfer ça me ferait des vacances ! Un peu énerver, je tente de me canaliser en me concentrant sur Catherine qui me dit qu’elle finit dans deux heures et qu’elle me racontera tout si on se retrouve au Paradise. Je la fixe un instant et reprends mon chariot.

-Je suis de garde cette nuit, mais je garde cette explication pour une prochaine fois si ça te va.

Je ramène la sirène sur la voie de la raison parce que j’ai l’impression qu’elle est partie un peu trop loin dans le monde de Liorah, ce monde parfait qu’elle conserve et cultive encore, je suis sur. Dans ce monde je parie que je ne suis pas défiguré, que l’on s’aime et que notre joyeuse bande continue de rouler comme sur des roulettes, malheureusement rien de tout ça n’est vrai, pas plus que le fait que ce connard bougera son cul pour trouver de l’argent réellement pour cet hôpital. Elle m’invite, seulement je ne suis pas libre, elle regarde sa montre et je la regarde finalement avant de sourire en coin en l’entendant.

-Peut-être… On verra bien…

Sur cette parole, je reprends mon chariot et pars doucement de mon côté sans me retourner. L’histoire de ma cicatrice… Ou l’histoire qui a détruit ma vie...



FIN