Besoin d'argent (Tessa Tempel)

Je traverse les couloirs de l'hôpital, je regarde de gauche à droite pour vérifier que tout va bien et que j'ai bel et bien terminé ma journée parce que même si je suis un infirmier je suis souvent retenu. Je ressemble d'avantage plus à un interne qu'à un infirmier parfois. Enfin bref, je vais profiter pour une fois et rapidement partir avant que l'on me retienne. Je vais donc dans les vestiaires et quitte ma tenue d'hôpital pour ma tenue de civil. Je n'ai pas pris ma voiture aujourd'hui c'est donc à pied que je me rends chez moi. Le froid d'Oslo étant revenu à pleine charge, je m'enfonce dans mon écharpe mais également mes mains dans mes poches, je trace ma route. Enfin ça c'est jusqu'à ce que j'entende une voix qui semble s'adresser à moi. Je me stoppe donc et relève un sourcil de surprise en regardant une jolie petite rousse face à moi.

Je n’avais qu’une envie en réalité c’était de rentrer chez moi. Chez moi c’est un peu le seul endroit où je peux souffler. Personne ne m’observe, je ne me sens pas épier et puis surtout je peux me soucier de personne ! Pas besoin de porter de masque, pas besoin de faire souffrir les gens que j’aime. Non… J’ai juste besoin de souffler, de fermer les yeux et me reposer. C’est limite les seules fois où je suis le Aedan d’il y a dix ans. Je ne le fais pas trop sortir quand même… Car c’est plus dur de le cacher ensuite. J’aimerais simplement parfois que ma vie redevienne ce qu’elle était, mais je sais que c’est totalement impossible.

Je suis tiré de mes pensées par une voix qui m’interpelle en pleine rue. Je me retourne et me stoppe et là mon regard se pose une belle rousse, bien que crasseuse. Elle doit être SDF. Elle me demande cinq à dix minute de mon temps… Je relève un sourcil et enfonce un peu plus mes mains dans mes poches… Puis d’une voix neutre, ni froide, ni en colère, ni… Quoique se soit, je reprends, clair net et précis.

-Qu’est-ce que tu veux ?

Je ne m’attendais absolument pas à me faire interpeller et encore moins par une femme qui semble vraiment… Sale. Du coup je peux facilement en déduire qu’elle doit être SDF, parce qu’elle est vraiment jolie, mais elle semble vraiment sale. Sa peau semble d’une pureté blanche d’origine, mais là elle semble grise. Sans compter sur ses vêtements qui ne sont pas de toute beauté où vraiment à la mode. Non on voit qu’elle porte ça pour se tenir chaud et rien d’autre. En même temps être SDF à Oslo en plein hiver ce n’est pas la meilleure idée du monde. Lorsque je lui demande ce qu’elle veut, d’un ton neutre et froid, comme je le suis depuis 10 ans, elle me raconte qu’elle souhaite me vendre sa boîte à musique. Je relève un sourcil et la fixe sérieusement.

-Qu’est-ce que tu veux que je foute d’une boîte à musique ?!

Je regarde alors autour de nous pour voir si je ne reconnais personne. Pour le moment ça va, personne de connu à l’horizon. Mais il fallait vraiment que je fasse attention ! Après tout, dans une ça venait et ça allait... Ca bougeait sans cesse.

La jeune rouquine me regarde avec ces grands yeux verts. Une chose est sur elle doit vraiment être de la rue parce qu’elle semble sale… On le voit parce que sa peau semble d’une blancheur extrême et là elle est limite grise, mais tout ça fait ressortir ses jolis yeux, alors dans un sens ça lui va bien même si c’est étrange de dire ça de quelqu’un : Ouai, la rue ça te va bien ! Enfin bref ! Elle semble intimidée où je sais pas quoi et je sais que ma grande cicatrice qui fait le long de ma joue peut en impressionner plus d’un ou d’une et c’est peut-être, voire surement, le cas avec la jeune demoiselle face à moi. Bon… D’autant plus que mon ton n’est pas ce qu’il y a de plus amical. Je l’observe un moment à ce qu’elle me dit puis regardant finalement autour de moi je la regarde à nouveau en tendant la main.

-Fait voire ton truc.

J’attends qu’elle me la passe et l’observe de plus près pour voir si elle vaut réellement son prix.

-Combien tu en veux déjà ?

Même si je sais que l’on peut me voir, au fond de moi je n’arrive pas à me dire : Aller Aedan ! Va jusqu’au bout de ton masque, de ta putain de vie qui n’est qu’un putain de mensonge et tourne le dos, va-t'en et laisse là dans sa merde. Non j’ai du mal à me dire ça, je n’y arrive pas vraiment. Pourtant je sais que je devrais. Elle finit par me passer son objet et je lui redemande le prix. Je veux faire vite, comme ça il y a moins de risques que l’on me surprenne. Elle ne semble pas fixe sur le prix et ne même pas savoir combien sa boîte vaux. Je relève un sourcil. Je pourrais l’arnaquer… Mais je ne le ferais pas. Mais je ne vais pas lui donner la somme maximum, même si j’aimerais… Cela montrerait trop mon côté généreux. Je sors donc 20 et lui montre.

-Je pense que ça ne veut pas plus que ça.

Elle vaut surement un peu plus, mais je ne peux pas me permettre de paraître trop gentil. Je lui donne donc de l’argent, mais sans paraître gentil… Ouai je sais ! C’est compliquer d’être moi. Elle me sourit alors tout en me disant que je fais peur. Je relève un sourcil et la regarde droit dans les yeux.

-Ah ouai ? Je te fais peur là ?

Et comme pour voir je fais un pas en avant, me rapprochant d’elle. Vu que je n’étais déjà pas très loin, je suis quasi collé à la jolie rousse.